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L'association HELPEN estime que 400 suicides par an ont lieu dans l'éducation nationale, qui n'a ni démenti, ni confirmé. Où sont les statistiques de la DEPP ?


L'association HELPEN estime que l'éducation nationale est un univers de souffrance au travail du fait d'un management coercitif, autoritariste, qui inclut le harcèlement moral dans ses pratiques managériales, ce qui se traduit par 400 suicides par an environ, pour près de 6.100 tentatives.

 

L'Education nationale n'a ni confirmé ni démenti ces chiffres. En 2018, le Ministre Jean-Michel BLANQUER avait donné le taux surprenant de 5,85 suicides pour 100.000 agents, ce qui donnerait 52 suicides par an, mais le fait qu'il n'ait donné aucun chiffre antérieur fait douter de son authenticité moyenne.

En effet, si le Ministre a réussi à donné un chiffre pour l'année 2018, pourquoi n'a-t-il pas donné les chiffres antérieurs, et pourquoi la DEPP n'en fournit pas depuis ? Autrefois, l'éducation nationale se contentait de dire "on n'a pas les chiffres, on ne fait pas ce type de statistique". Mais la délivrance du chiffre de 2018 par le Ministre de l'époque a démontré que si: il existe des statistiques, mais elles sont cachées au grand public.

 

Dans les années 2006 à 2011 des cadres de l'entreprise France Telecom ont pratiqué le harcèlement moral pour dégraisser les effectifs (22.000 prévus sur 120.000 salariés) dans le cadre d'une réorganisation du groupe. En 2008-2009 cela se solde par 35 suicides, qui ont valu en 2019 lors d'un procès très médiatisé, la condamnation de plusieurs cadres et dirigeants à une amende de 75.000 € pour harcèlement moral. Soit en résumé, 2142,85 € par personne décédée. 

 

Autant dire qu'en France, harceler moralement ou sexuellement une personne ne fait pas craindre grand chose à des dirigeants, comme si la loi était de leur côté. Tous ceux en position managériale qui pratiquent cette technique tablent sur le silence de leurs victimes, des hommes et des femmes adultes, qui en parallèle multiplient les circulaires pour lutter contre le harcèlement en milieu scolaire, et décernent même des trophées pour les meilleures vidéos réalisées par des classes.

 

En France, dans toute structure, le harcèlement tue à petit feu et finit par tuer pour de bon. Il conduit des innocents, des consciencieux, des hypersensibles, à porter atteinte à ce qu'ils ont de plus cher: leur vie. Certains finissent handicapés à vie. Et les harceleurs s'en sortent toujours. Dans l'éducation nationale, un harceleur peut être un manager qui prétextera qu'il n'a fait que son travail et rien que son travail, et la faute pèse forcément sur cet agent qui n'a pas supporté son autorité et le stress que son manager lui imposait au quotidien.

 

En France, tout manager sait qu'il ne risque pas grand chose. Les pervers narcissiques et autres manipulateurs agissent toujours sans laisser de preuves écrites. Ils savent ce qu'ils font. Ils poussent leurs victimes dans leurs retranchements, les poussent à la faute, leurs reprochent tout et n'importe quoi. Car le manager possède le pouvoir de faire obéir, il ou elle se voit confier tant de pouvoir et tant de puissance par sa tutelle hiérarchique, que tout lui semble réalisable.

 

Chaque année, la quasi totalité des harceleurs passe entre les mailles du filet pendant que la quasi totalité de leurs victimes souffre en silence, certains commettant l'irréparable.

 

Dans la quasi totalité des cas, le système Education nationale, si l'agent qui s'est suicidé n'a pas laissé d'écrit détaillant le "pourquoi de son geste ?", dira laconiquement "il avait des problèmes personnels, ça se savait, il/elle était suivi(e) par un psychologue"

 

Et la vie continuera au pays des harceleurs puisque leur victime sera décédée. Jusqu'à la prochaine. Ils se feront silencieux quelques temps avant de recommencer de plus belle dans leur prochain poste, cette mutation prise pour les protéger d'éventuelles conséquences personnelles sur leur précédent lieu de travail.

 

Le harcèlement n'est pas opéré que par les managers, mais c'est quand même une grosse partie de responsables. Il y a aussi ces collègues envieux qui veulent gagner plus et sont prêts à discréditer leurs collègues auprès de leur supérieur. Il y a toutes ces querelles intestines qui peuvent exister dans tout environnement de travail avec ceux qui répandent des rumeurs, ou se permettent des gestes déplacés. Les hypersensibles se repèrent facilement: ils réagissent impulsivement à la moindre critique personnelle, ce sont des proies faciles, susceptibles, que le moindre stress fera vaciller.

 

Alors un suicide, c'est une famille endeuillée. Un père et/ou une mère qui pleure son enfant disparu, même adulte. C'est peut-être une épouse et des enfants qui pleurent eux aussi. Ce sont 400 familles par an endeuillées dans l'éducation nationale, comme un mauvais film qui  se répète chaque année, dans un système tellement gigantesque, qu'il ne fait même plus attention à eux, puisqu'ils ne correspondent qu'à 0,03% de sa masse.

 

Avec HELPEN, AIDE AUX PROFS a envie de dire STOP ! 

 

Mais nous sommes impuissants à endiguer un véritable fléau. Nous ne pouvons que proposer, et notamment que l'éducation nationale diffuse chaque année ses statistiques de tentatives de suicides et de suicides parmi ses personnels, et ce sur les 25 dernières années, au moins.

 

Un Observatoire National des Suicides (ONS) a été créé en France par le décret n°2018-688 du 01.08.2018 et il a été renouvelé en 2023. Tous les deux ans il publie un rapport, mais ses statistiques sont régionales, au mieux départementales, et ne ciblent pas des ministères, ne permettent pas de signaler des tendances qui seraient liées à un mode de management toxique. Il est impossible dans ces bilans de connaître le chiffre exact des suicides survenus dans l'éducation nationale. 

 

Jean-Michel BLANQUER donnait le chiffre de 5,85 suicides pour 100.000 en 2018 alors qu'à la même époque le chiffre moyen de la population française était de 13 pour 100.000. Il est quand même effarant de penser que dans un ministère où les incivilités ne cessent de grimper, où les tensions soient si vives au quotidien dans des milliers d'établissements, où les médias communiquent sans cesse de nouvelles agressions et tensions dans les écoles, collèges et lycées, ce chiffre soit si minime. Forcément, en 2018 il devait être extrêmement bas, et pour la seule et unique fois de son histoire, un Ministre a décidé de livrer ce chiffre pour qu'il marque les esprits. 

 

Mais ce qui marque les esprits, c'est cette tentative en 2024 de l'académie de Normandie de passer sous silence une dizaine de suicides d'agents, et ces suicides qui jalonnent chaque année scolaire, dans un silence assourdissant des hautes autorités de l'éducation nationale. Le Ministre se déplacera seulement si le suicide a eu lieu "dans les murs" (de l'école, du collège, du lycée), et assurera toujours les personnels de "sa plus vivre émotion", en demandant "un suivi psychologique des enfants et des adultes qui le souhaiteront".

 

Et puis après, RIEN. Aucune enquête interne pour en savoir plus, pour tenter de trouver l'élément déclencheur. Le travail, c'est 8h dans la journée d'un agent, plus de 36 semaines par an pour un professeur et plus de 45 semaines par an pour un agent administratif. Ce serait quand même étonnant que le travail ne porte aucune part de responsabilité dans un suicide. Tout n'est pas lié qu'au contexte personnel. Tout est lié.

 

Les suicides de l'année 2025 parmi les agents de l'Education nationale qui ont été médiatisés:

 

Omerta dans l'académie de Normandie, dénoncée par les syndicats le 29 janvier 2025.

 

Une agente d'entretien du collège de Portet-sur-Garonne a tenté de se suicider à la mi-mars 2025.

 

Le 29 avril 2025 le principal du collège des Renardières de Courbevoie fait "une chute mortelle depuis son appartement de fonction": accident, ou suicide ? On ne le saura pas. Mais l'article dit "à ce stade, toutes les hypothèses sont envisagées, y compris celle de l'accident". Pour ne pas avoir à se poser plus de questions, le Recteur a préféré penser que c'était un accident.

 

Le principal du collège de Montsinéry-Tonnegrande en Guyane qui s'est suicidé le mercredi 2 juillet 2025.

 

Cette enseignante du Lycée Cuvier de Montbéliard qui a tenté de se suicider par pendaison le jour de la pré-rentrée le vendredi 29 août 2025, secourue in extremis par ses collègues.

 

Caroline GRANDJEAN, enseignante et directrice d'école dans le Cantal, qui s'est suicidée le 1er septembre 2025 après un long harcèlement lesbophobe comme le relate l'association "SOS homophobie".

 

2 agents du lycée Pothier d'Orléans se sont suicidés le 21 septembre 2025 (un agent de restauration) au soir et le 23 septembre 2025 (un professeur de Physique-Chimie en Classes Préparatoires).

 

POUR ALLER PLUS LOIN AVEC LES DONNEES COLLECTEES PAR AIDE AUX PROFS DEPUIS 2019 SUR LE WEB

 

L'appel vidéo de Guillaume DELABY relayé sur Instagram et sur Facebook pour dénoncer l'inertie du système, même celle des syndicats, et l'opacité institutionnelle, sur ce chiffre tragique: "un suicide par jour dans l'Education nationale".

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