
Nous amorçons bientôt une nouvelle année scolaire illustrée par une illustratrice BD de talent, Anna CHRONIQUE. Elle publie différents ouvrages de BD et son
dernier, "Chroniques de Tunisie", est un véritable succès. Nous l'avions interviewée le 03.06.2020. Elle a aussi illustré le 4e guide pratique de Rémi BOYER,
publié sous pseudo et consacré à ceux qui doivent accompagner leurs parents en fin de vie.
Le premier dessin s'intéresse à la préparation de la rentrée par les chefs d'établissement qui doivent reprendre leur travail lundi 18 août après un bon
mois de congés que l'on espère avoir été reposant.
Il n'est pas simple d'être principal de collège ou proviseur de lycée : ce sont d'importantes responsabilités.
Les professeurs eux, n'attendent du chef d'établissement qu'un bon emploi du temps en début d'année, l'attribution d'IMP ou de briques de Pacte quand ils
l'ont demandé, et la capacité à punir ceux des élèves qui leur posent problème en classe, et à calmer certains parents d'élèves agressifs. Ils comptent aussi sur leur chef d'établissement pour
accepter leurs projets pédagogiques et notamment ceux comprenant des sorties d'une journée ou d'une semaine.
Ce n'est pas simple d'être chef d'établissement, et on n'oublie pas que la grande majorité d'entre eux sont d'anciens professeurs !
Il faut gérer toutes les sensibilités et les susceptibilités et savoir gérer ces emmerdeurs qui colportent sur vous tout le mal qu'ils puissent vous
faire.
En début d'année et même avant la rentrée il y a ces professeurs enquiquineurs qui viennent vous rendre visite, super culottés, pour demander si vous avez accepté
leurs vœux d'emploi du temps.
La logique serait de les refouler, mais stratégiquement un chef d'établissement peut avoir envie de se mettre "dans la poche" une "personnalité" de l'établissement
(professeur le plus ancien, professeur syndiqué ayant pris de l'ascendant sur les 2/3 de ses collègues avec une forte capacité de nuisance, etc).
Être chef d'établissement, c'est de la stratégie, du management, de l'anticipation, de la logistique, avec une solide résistance au stress aussi et une
forte capacité de résilience.
Le chef d'établissement est au carrefour des demandes et des mécontentements :
- ceux des parents,
- ceux des élèves,
- ceux des professeurs,
- ceux des autres agents publics de l'établissement,
- ceux extérieurs à l'établissement qui vont colporter sur les réseaux sociaux le mécontentement de l'une de ces catégories d'individus.
Ça peut expliquer les abus, certains deviennent carrément paranos et maltraitants.
Devenir chef d'établissement c'est la reconversion la plus facile pour qui ne veut plus enseigner mais rester fonctionnaire dans l'éducation nationale sans aller
vers l'inspection ni l'administration en rectorat.
Certains y font de très belles carrières d'un petit à un grand établissement au fil de leur expérience. Ils savourent d'être le capitaine du vaisseau, avec
toutefois la pression constante de leur tutelle qui les bombarde des centaines de fois par an de circulaires.
Alors le premier dessin évoque cette difficile préparation.
A partir du 18 août les établissements se réveillent ainsi que les rectorats.
A partir du 25 août les journalistes éducatifs sortent de leur sommeil pour préparer la rentrée. En général ils "minent" le terrain du Ministre en abordant par des
reportages tous les sujets qui fâchent... et ce sera une nouvelle année scolaire, attentive à tous les dysfonctionnements du système, qui réagit en faisant comme si tout se passait bien, et comme
si tous ces dysfonctionnements n'étaient que des détails insignifiants, lui qui dédouane ses hauts fonctionnaires de toutes leurs dérives autoritaristes. Les années précédentes, la médiatisation
des manifestations des professeurs demandant le départ de leur chef d'établissement l'a amplement prouvé: même si 80% des professeurs demandent le départ du chef d'établissement, c'est lui que
son Recteur soutiendra, pas les profs. Eux sont juste là pour obéir.
Et lors de la conception des emplois du temps et de la répartition des services, chaque chef d'établissement en est parfaitement conscient: c'est lui/elle qui aura le dernier mot. Certains sont intrinsèquement bienveillants et tentent d'arranger tout le monde. D'autres ont "leurs têtes", et règlent leurs comptes à l'occasion de cette rentrée, l'air de rien...
Moralité: mieux vaut avoir son chef d'établissement de son côté, qu'y être opposé. Et c'est valable dans toute structure: mieux vaut être apprécié de son manager direct que d'avoir maille à partir avec lui/elle.
Et quand ça ne se passe pas bien malgré tous ses efforts, il reste deux solutions pour quitter l'établissement où l'on souffre:
1) Demander sa mutation sans être trop sélectif sur les voeux
2) Obtenir un CLM puis un CLD qui fera perdre le poste. Là, c'est utiliser les grands moyens, une fois la dépression bien installée.
Pour qui veut devenir chef d'établissement, ou pour qui l'est déjà, c'est intéressant de se plonger dans le travail d'enquêtes de Georges FOTINOS et de José Marion HORENSTEIN. A eux deux ils ont réussi à démontrer qu'un chef d'établissement sur deux n'aime pas son métier. Il en reste la moitié heureuse, c'est déjà ça. Mais pour les 50% malheureux, ça signifie que les personnels dirigés ont des raisons de se sentir en mal-être au travail régulièrement.
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