Le mode de management des personnels d'encadrement n'est plus du tout adapté à des Bac+5/+10


Les femmes Professeurs des Écoles (elles sont 93% des effectifs en Maternelle, 78% des effectifs en Primaire) sont les plus nombreuses de ceux qui nous contactent ) se plaignent de leurs supérieurs hiérarchiques directs, les IEN, souvent moins diplômés qu’elles. Beaucoup d'inspecteurs et aussi de Conseillers Pédagogiques, qui travaillent et sont donc influencés par leur mode de management autoritaire, se comportent comme des « petits chefs », en axant leur discours sur la « performance des élèves », basant l’essentiel de leur évaluation sur les résultats scolaires obtenus par les élèves, et non sur leurs efforts personnels pour y arriver.

 

Beaucoup de professeurs des écoles ont fait ce métier pour consacrer plus de temps - le pensaient-elles - à leurs enfants, en abandonnant souvent une carrière prometteuse au profit de celle de leur conjoint. Celles dont les conjoints sont souvent mutés vivent un véritable calvaire, et le supportent d'année en année. Yves DELOISON a fort bien décrit cette situation dans son ouvrage Pourquoi les femmes se font toujours avoir ? Une partie possède un diplôme d'ingénieur, a pu avoir des responsabilités importantes dans le privé avant de devenir professeur, et ne supporte pas cette infantilisation permanente, cette déqualification, cette perte de compétences. D'autres sont diplômées de Sciences Po, de Sup de Co, de Pharmacie, d'un Doctorat, sans avoir pu décrocher le sésame d'un poste de Maître de Conférences tellement la concurrence est rude en université selon les spécialités, certaines n'ayant pas d'autres débouchés que de se replier vers l'enseignement, en fin de course.

 

La formation des personnes d'encadrement, inspecteurs et chefs d'établissement, est basée sur un mode de management descendant, pyramidal, chacun à son échelon étant la courroie de transmission des ordres du dessus, vers l'échelon du dessous. C'est comme cela dans notre pays, massivement,  au moins depuis l'époque des Carolingiens, il y a plus de 1.200 ans.

 

Dans ce qui est enseigné dans les écoles de formation de l'administration, on note 4 types de management:

 

- Le management directif, préconisé en contexte d'urgence, est en fait le plus couramment pratiqué dans l'Education nationale. C'est le plus facile à mettre en oeuvre. D'où ce sentiment des professeurs d'être piloté par des chefs d'établissement trop autoritaires, ou d'avoir affaire à une administration sans états d'âme pour leurs difficultés personnelles et professionnelles.

 

- Le management persuasif, organisationnel et relationnel, est plus à l'écoute des collaborateurs. Certains proviseurs, principaux de collège et inspecteurs le pratiquent.

 

- Le management participatif, qui implique les collaborateurs dans la prise de décision pour inciter chacun à la mise en oeuvre des objectifs qui le concernent. Ce mode de management par la confiance peut se rencontrer dans le 2nd degré dans les collèges et les lycées pour faciliter l'organisation de projets par les professeurs, mais il demeure rare.

 

- Le management délégatif, où l'encadrant accorde sa confiance à ses collaborateurs, en leur indiquant les missions et  résultats à obtenir, laissant chaque professeur mettre en oeuvre ses plans d'actions et obtenir les résultats espérés. Cela reste exceptionnel.



Ces professeurs n'ont pas supporté l'attitude de leur hiérarchie, facteur de leur départ définitif:


Tous les témoignages que nous diffusons sont strictement anonymés, les prénoms changés. Ils proviennent des formulaires de contact que plus de 16.600 professeurs ont complété en nous contactant, et que nous avons ensuite conseillés bénévolement. Dans le cadre de témoignages relatifs à la santé, que nous ont confié les personnes sans que nous l'ayons demandé, nous avons renforcé cette anonymisation pour conserver la nature de leur souffrance au travail.


Inès, 32 ans, Professeur des Écoles depuis (…) ans à plein temps, avait réalisé un brillant parcours en entreprise avant de choisir d’enseigner :

 

"Après un bac ES option mathématiques, j’ai obtenu un diplôme dans une École Supérieure de Commerce reconnue, puis j’ai poursuivi deux ans en Master d’Audit, conseil et contrôle de gestion ; le tout ponctué d’expériences professionnelles en

entreprises (télévision, cabinet de conseil).

 

Mais par conviction, vocation et parce que je crois à la transmission des savoirs et à l’école de la République comme ascenseur social, j’ai changé de voie pour devenir Professeur des Écoles. Je me suis présentée en candidat libre au concours, que j’ai obtenu dans les premières places, ce qui m’a permis de rester sur mon département. S’en est malheureusement suivie une année de formation où j’ai

commencé à déchanter malgré ma passion pour ce métier.

 

Depuis trois ans je suis enfin titulaire de mon poste, et je me bats avec acharnement pour les élèves et des projets (visites, projets culturels...) dans l’intérêt de mes élèves que je porte à bout de bras. Mais voilà, chaque année je m’enfonce un peu plus et je me heurte un peu plus à une hiérarchie qui nous fait vivre dans un climat de suspicion, de pression et de répression.

 

Je suis en parallèle en dernière année de licence de Sociologie, mais il devient difficile de valider mon année car on me place des bâtons dans les roues, nos horaires sont exténuants, pas de pause déjeuner entre soutien scolaire et réunion, des conseils de cycle et d’école jusqu’à 23 heures le soir après avoir travaillé depuis 8h jusqu’à 18h sans interruption...et surtout je perds la passion, je me dis que je ne conviens pas aux directives académiques et je ne le supporte plus. Les parents sont dans l’agressivité permanente, leurs enfants ont toujours raison, certains sont de futurs délinquants et nous laissons faire (insultes, insolence...).

 

Mes problèmes de santé s’aggravent et je risque d’y laisser beaucoup. Je refuse de m’arrêter car je ne m’écoute pas, mais les médecins sont inquiets pour mon état physique et mental. De plus, notre inspectrice a fait démissionner des enseignants de valeur et gère sa circonscription dans la toute puissance, ça ne me remonte pas le moral. D’autre part, beaucoup dans mon entourage me disent que je ne mesure pas mes capacités et que j’ai beaucoup de potentiel et de diplômes et que je peux aussi quitter cette entité en démissionnant pour devenir mon propre patron."


Nicolas, 32 ans, Professeur de Sciences Physiques, enseignait depuis 4 ans, et, intellectuellement, se s’y retrouvait pas :

 

"Je suis actuellement Titulaire sur Zone de Remplacement (TZR) en physique-chimie depuis 2 ans. J’entame ma 4e année d’enseignement. Deux raisons principales me poussent à vous écrire. La première, la moindre, est ce statut de TZR qui est éprouvant : changer plusieurs fois par an d’établissement, de collègues, d’élèves, est assez stressant. Étant donné les barèmes au mouvement, je ne suis pas prêt d’avoir un poste fixe ; mais je peux me faire une raison. La seconde raison, principale, est le comportement des élèves : je supporte de moins en moins leurs incivilités et me sens de plus en plus aigri et anxieux (insomnies, etc.).

 

Le métier d’enseignant est déjà une reconversion professionnelle pour moi. Titulaire d’un doctorat en astrophysique, j’ai quitté le domaine de la recherche car les débouchés étaient très faibles (surtout en astrophysique) et me suis dirigé vers l’enseignement après un chômage longue durée dans l’idée de pouvoir transmettre mon savoir. L’incivilité des élèves, particulièrement en collège, m’est donc frustrante, voire anxiogène. J’ai vraiment l’impression de mal faire mon travail, ce qui accroît mon anxiété vis à vis de ma hiérarchie. De fait, je ne me vois pas exercer ce métier plusieurs années ou dizaines d’années encore, en tous les cas pas jusqu’à ma retraite ! Je souhaite donc m’orienter vers un poste en détachement qui soit stimulant intellectuellement. L’idéal serait de pouvoir me réorienter à moyen ou court terme vers l’enseignement supérieur et/ou la recherche."


Nicole, 42 ans, professeur des écoles depuis 10 ans à temps partiel, était lassée des classes difficiles, et d’une hiérarchie trop exigeante :

 

"Le métier de professeur des écoles que j’ai choisi fit suite à celui d’oenologue que j’ai exercé pendant 10 ans. Au bout de 10 années scolaires tantôt riches, tantôt éprouvantes, j’en viens à envisager de me ré-orienter à nouveau, lasse d’enseigner à des classes toujours plus difficiles, avec toujours moins de reconnaissance, et toujours plus d’exigences de la part de notre hiérarchie."

 


Daniel, Professeur de SVT en lycée, 54 ans et 30 ans d’ancienneté, ressentait une accumulation de facteurs d'épuisement :

 

"Je suis devenu enseignant car il n’y avait pas de débouché dans ma spécialité (géologue). 

J’ai été MA plusieurs années avant d’avoir le CAPES puis l’agrégation. 

J’ai été surveillant au cours de mes études donc l’enseignement me semblait logique et accessible mais ce n’était pas une vocation.

 

J’arrive bientôt à 55 ans. Ce travail m’est devenu pénible du fait d’une accumulation progressive de choses : une lassitude, une motivation qui s’est étiolée, une inspection qui a freiné ma progression professionnelle, une hiérarchie déplaisante et indifférente, l’ingratitude des élèves et la suspicion de leurs parents, l’image négative des enseignants dans les médias bien relayés par les Politiques, le discours d’inspecteurs déconnectés de la réalité quotidienne de l’enseignement, le côté répétitif des programmes, des problèmes de voix récurrents… et surtout l’envie de faire autre chose : c'est-à-dire créer une petite maison d’édition.

 

J’ai demandé dans le cadre du CPF, des stages (privés) de formation sur le milieu de l’édition, mais la participation financière allouée par le rectorat était trop faible pour que j’y donne suite."

 


Corinne, Professeur des écoles, 45 ans et 22 ans d’ancienneté, nous contactait, très en colère contre sa hiérarchie, ce qui lui donnait envie de quitter définitivement son métier, qu'elle appréciait pourtant:

 

"Je me suis renseignée l'année dernière sur la faisabilité de mon projet de travailler en tant que psychologue à l'hôpital pour compléter mon mi-temps d'enseignant. La DRH m’avait informée qu’il fallait simplement compléter le formulaire. J’ai également rencontré la conseillère de la mobilité professionnelle. Celle-ci m’avait apporté des réponses très encourageantes pour mon nouvel objectif.

 

1. J’ai donc accompagné le formulaire type d’une lettre expliquant les motivations de cette demande de mi-temps en formulant de manière explicite mon projet de travailler en tant que psychologue clinicienne. 

Ayant obtenu le mi-temps, j’étais d’autant plus persuadée de la continuité du soutien apporté.

Mon projet était prêt à démarrer, Il ne restait plus qu’à obtenir l’autorisation de cumul d’activité, or celle-ci m’a été refusée. Je ne comprends absolument pas cette décision ni ce motif étant donné mes démarches préalables, la teneur et la qualité de mon projet. Etant à mi-temps, et ne travaillant dans mon cabinet qu’un seul jour par semaine cette deuxième activité n’entraverait en rien mon service au sein de l’Education Nationale.

 

2. J'ai demandé à faire fonction de psychologue scolaire sur des postes restés vacants et je n'ai eu aucune réponse 

3. On me dit que je ne peux pas postuler sur un poste de psy scolaire car je n'ai pas fait fonction cette année. Ils se moquent de moi !!!!

3. J'ai appris aujourd'hui que ma demande de dispo pour l'année prochaine a été refusée pour « nécessité de service ». 

Si je ne peux exercer mes compétences ni dans l'éducation nationale ni en dehors je vais péter un câble. Il est hors de question que je sois TRS à 100 km de chez moi avec 8 niveaux de classe puisque cette année j'ai déjà 2 jours de classe avec 4 niveaux (gs,cp et cm1, cm2).

 

Je ne veux pas rester dans une machine qui ne prend pas en considération ni les compétences ni les désirs de ses employés. Ils ne pourront pas me forcer à faire ce que je ne veux plus faire, je veux être psychologue, j'ai fait 2 ans d'étude où je me suis donnée à fond qui m'ont demandé beaucoup de sacrifices à moi et à ma famille, ce n'est pas pour être instit jusqu’à la fin de ma carrière. Je ne sais pas si je vais tenir le coup, je suis tellement en colère, frustrée, déçue.

 

Que puis-je faire ?


Quentin, Professeur des écoles, 40 ans et 18 ans d’ancienneté, trouvait l'administration trop violente pour espérer continuer d'enseigner :

 

"Je suis devenu enseignant parce-que j'aime être utile à aider, car l'éducation est le premier et le plus important rempart à la barbarie, et j'aime servir à permettre aux humains à devenir plus Libres, autant que faire se peut. J'ai des diplômes d'enseignant, des niveaux techniques, des dizaines de stages, d'encadrement de formateurs pédagogiques, etc... Je suis aussi moniteur national Premiers secours.

 

Je souhaite quitter car :

- à présent l'administration agit de manière trop violente pour ce que je peux endurer,

- mes objectifs initiaux se trouvent entravés par un système qui souhaite ou tend vers à peu près leur contraire,

- je n'apprends plus assez de mes expériences professionnelles et cela me fait vraiment défaut. A une place où je ne serai plus entravé dans mon élan.

 

A un poste où je peux gérer moi-même mon métier, mes postes, l'endroit où je travaille... autant que possible. Dans la relation d'aide, aux adultes plus certainement. Dans un métier où j'aurai des possibilités d'évoluer, d'apprendre, de rencontrer des méthodes nouvelles... J'aimerais depuis une grosse dizaine d'années devenir Masseur Kinésithérapeute."


Karine, ex-professeur des écoles, 26 ans, 2 ans d’ancienneté et déjà désabusée par le métier de professeur, nous avait contactés pour le quitter

 

A l'issue de mes études de pharmacologie, je me suis rendue compte que cela je correspondais pas à mes attentes.

Je voulais un métier enrichissant au quotidien, sans routine.

Travaillant déjà de manière régulière avec les enfants (animatrice et entraineur) je me suis orientée vers l'enseignement appréciant leurs contacts, le travail avec eux et l'aspect éducatif.

 

Prenant un risque dans ce changement de voie, j'ai fait le choix de m'inscrire en M1 enseignement à l'ESPE qui me permettait de découvre ce métier immédiatement grâce à un cursus en alternance.

 

Aujourd'hui après plusieurs années (M1 en alternance, M2 avec des stages, DU à mi-temps et 2 ans de titulaire), je n'imagine pas mon avenir dans l'Education Nationale (j'ai pris conscience de cela voilà plusieurs mois). Je me suis donc mise à réfléchir sur mes possibilités ...

 

Je trouve ce métier très stressant avec une forte pression de l'inspection, des programmes, des directeurs, des collègues, des parents.... Je me sens complément démunie au quotidien, pas du tout accompagnée dans les programmes et incomprise face à mes problèmes quand je les expose (je me sens en permanence jugée ...).

 

Le seul côté positif : mes élèves ! Mais finalement cela ne représente pas grand-chose du métier ... Je suis en pleine réflexion sur mon avenir ...

 

Pourtant une chose est certaine : je n'imagine pas mon avenir dans l'Education Nationale. D’où ma démarche ! Après avoir réussi un changement de carrière en passant de la pharmacologie à l'EN avec juste ma détermination et ma passion comme bagage, je me dis qu'il est bon de suivre ses envies ...

 

 

Un regard extérieur sur mon projet me serait très bénéfique : impossibilité de parler avec mes collègues pour qui je suis la petite jeune qui n'a pas vraiment le droit de parler, impossibilité de parler avec mon entourage pour qui le boulot de prof est la planque parfaite (cf les dernières paroles de nos politiciens) et impossible de trouver un référent mobilité capable de me répondre et d'analyser mon projet.


Riham, 33 ans, professeur des écoles, a eu un contact décevant avec son IEN, ce qui l'a conduite à rechercher une reconversion en nous contactant:

 

"J’ai parlé de mon projet professionnel à mon IEN l’an passé, car elle devait en plus émettre un avis sur mon dossier de candidature pour un poste de conseiller en formation continue (IEN qui ne m’a jamais inspectée, qui ne me connaissait même pas !) Au cours de l’entretien, en consultant mon précédent rapport d’inspection (daté de 2 ans auparavant), celle-ci s’est rappelée de certains déboires qui s’en sont suivis (contestation de rapport, entretien avec inspecteur d’académie adjoint, contre inspection, rapport modifié…L’inspecteur en charge de cette inspection ne s’est pas rechargé des classe-relais l’année suivante ?  Elle m’a signifié qu’il s’agissait d’un de ses très bons amis…)

 

Mon entretien avec elle a alors pris une autre tournure. Elle m’a fait une critique de mon parcours professionnel, qui manquait réellement de stabilité d’après elle (il est vrai que je change assez fréquemment de poste, mais au vu de la tournure de la discussion, je ne pouvais pas lui dire que je ne trouvais pas ma place dans l’éducation nationale, que j’étais déçue en permanence, ni lui expliquer les raisons multiples de ces déceptions…), et m’a annoncé qu’au vu de ce manque de stabilité, je n’étais d’après elle pas à même de conseiller des gens.

 

Je lui ai alors expliqué en quoi consistait le métier de conseiller en formation continue, car elle m’a expliqué ne pas en savoir trop sur le sujet, mais son avis est resté de toute façon assez négatif (alors que sur le terrain, j’enseignais cette année-là en Segpa, dans un collège difficile, qui n’a pas eu ni de chef d’établissement, ni d’adjoint, en raison de problèmes médicaux,  pendant plus de 3 mois, que la situation au quotidien était explosive…Ca, ça ne compte pas, et ça ne peut faire faire partie des raisons qui font que je quitte la Segpa !)

 

Depuis, j’hésite encore plus à demander conseils ou avis auprès des IEN, même s’ils ne fonctionnent pas tous sur le bouche-à-oreille, heureusement, je n’ai pas envie de prendre de risques ! 

 

Je vais postuler à nouveau cette année pour le même poste de conseiller en formation continue, j’ai une autre IEN, mais je ne me fais pas d’illusions et n’ai plus confiance, donc je ne compte pas évoquer mes projets professionnels dans le détail ! "

 


Christine, ex-professeur de maths, 32 ans, 7 ans d’ancienneté, serait sans doute rester enseigner si elle avait senti de la reconnaissance de ses efforts par son inspecteur.

 

La pression est difficile (venant de la direction, des parents, des élèves, non reconnaissance du travail par l'inspecteur) Psychologiquement certaines fois cette pression est difficile.

 

Je ressens une fatigue psychologique. La pression de ne pas finir les programmes, il faut toujours aller de plus en plus vite au détriment des apprentissages des élèves.

 

Pour moi on délaisse la sérénité des élèves en voulant finir les programmes de peur que des parents se plaignent que celui-ci n'est pas terminé.

 

Les parents se plaignent et se donnent le droit de juger notre enseignement alors qu'ils n'ont pas les capacités pour le faire. Mais ils ont toujours leur mot à dire, pour nous juger personnellement. La pression que subissent les autres enseignants m’atteins aussi. Certains enseignants se font insulter devant les élèves par des parents.

 

Je ne pensais pas que ce serait si difficile de ce côté-là. J'aime beaucoup préparer mes cours mais les enseigner, beaucoup moins ...

 

Le temps de travail en dehors de la présence de l'établissement est et devient de plus en plus lourd.

Le collège est un environnement qui ne me convient pas (fonctionnement, comportements élèves, etc).

 

 

Je veux trouver un nouveau projet professionnel dans lequel je pourrai m'épanouir, sereinement.


Géraldine, Professeur de Mathématiques, 36 ans et 11 ans d’ancienneté, ne supportait plus la pression de la hiérarchie, ce qui expliquait son envie de quitter ce métier vers lequel elle s'était orientée par vocation :

 

"C'est une vocation. J'ai toujours voulu enseigner. Et je me suis fixée sur les mathématiques dès la terminale. Étudiante, je donnais des cours particuliers pour arrondir mes fins de mois. J'intervenais dans des associations d'aide aux devoirs aussi. J'ai continué a donné des cours particuliers durant mes premières années d'enseignements. 

 

J'aime à la fois expliquer aux élèves, préparer mes cours et les mathématiques.

 

Je souhaite quitter l’éducation nationale car je ne peux plus faire ce métier dans de bonnes conditions. Je passe beaucoup de temps à préparer mes cours, inventer de nouvelles activités, me documenter... Je trouve que c'est un travail essentiel pour permettre aux élèves de mieux apprendre. Mais j'ai de moins en moins de temps à y consacrer. Les emplois du temps ne permettent plus d'avoir des grandes plages horaires libres pour ce travail de fond. Les réunions de concertations et administratives se multiplient et débordent sur les soirées, les mercredis et mêmes les vacances. 

 

La pression de la hiérarchie est de plus en plus importante et celle des parents également. Cette année dans mon établissement, 4 enseignants ont eu des arrêts de plusieurs mois, l'un d'entre eux est en burn-out. Au moins une dizaine d'autres ont eu des arrêts réguliers car leur santé est très fragile. Je ne souhaite pas en arriver là.

 

La dernière réforme tend à harmoniser les pratiques et tue à petit feu la liberté pédagogique. Celle qui arrive va engendrer un temps fou passer à établir des listes de compétences, à décider de curseurs d’acquisition et à remplir des grilles. Encore du temps en moins pour l'essentiel : enseigner."


Maud, Professeur d’Allemand en lycée, 38 ans et 10 ans d’ancienneté, ne supportait plus l'autorité hiérarchique telle qu'elle se pratique dans l'Education nationale :

 

"Je suis devenue enseignante par ce que ce métier était l'un des seuls possibles dans ma filière d'étude. J'ai passé un baccalauréat scientifique mais j'ai redoublé l'année de Terminale. J'ai donc décidé de m'engager vers l'allemand, une langue qui m'était assez familière. Je ne me suis posé aucune question quant à mon orientation professionnelle au lycée ou à l'université.

 

Je souhaite quitter l'éducation nationale car l'allemand est en perte de vitesse et n'ayant pas de points de famille et peu de points d'ancienneté, il m'est quasiment impossible d'obtenir un poste fixe en lycée. De plus j'ai eu des difficultés professionnelles au collège avec des difficultés à gérer les classes. J'avais l'inspection sur le dos et mes supérieurs m'ont dit d'envisager de changer de métier.

 

J'ai l'impression en 10 ans de carrière de ne pas avoir évolué. Il n'y a pas d'évolution possible dans le métier d'enseignant. J'ai l'impression d'être lasse du métier et d'avoir perdu mes illusions du début. Ce métier n'est pas assez rémunéré et n'est pas assez considéré dans la société, si bien que j'en suis aigrie. 

 

De plus, être TZR à presque 40 ans, c'est fatiguant. Finalement, je me pose tout autant de questions qu'en début de carrière et espérait progresser et me sentir mieux dans le métier en acquérant de l'expérience mais ce n'est pas le cas. J'ai l'impression que ce métier m'a privé d'une vie personnelle épanouie. Je n'ai pas pu construire de foyer en étant mutée à la campagne. Et si je déménage sans arrêt, cela doit être un signe d'un certain malaise."


Nina, 36 ans, professeur de Langues, a tenté en vain d'obtenir un bilan de compétences par son académie, alors que son Droit Individuel à la Formation (DIF) aurait dû le lui permettre. Dépitée de l'accueil de la hiérarchie académique, elle a contacté notre association pour quitter son métier:

 

"Je n'arrive tout simplement pas à joindre le rectorat pour savoir si j'ai droit à un bilan de compétences ! Mais non, je n'ai pas pensé à joindre cette cellule d'aide, car mon rectorat est XXX, et j'habite à Paris depuis septembre.

 

J'ai appelé le service « secondes carrières » du rectorat, ils m'ont semblé bien démunis. Ils n'ont fait que me renvoyer à mon propre rectorat (à 800 km...), et à la Bourse interministérielle de l'emploi, que je consulte régulièrement mais qui présente surtout des postes à dominante gestion-finances-éco.

Votre association est la seule qui fournisse ce service. J'ai tardé car j'aurais voulu rencontrer d'abord des membres pour discuter de visu, et parce que fondamentalement, je pensais y arriver toute seule; or, je me sens dans l'impasse actuellement, le temps passe vite !

 

Il est sûr qu'il est tabou de parler à ses collègues ou à ses supérieurs de ce genre de choses, cela est vu comme une trahison, on « quitte le navire » en quelque sorte. De plus on suppose toujours que cela masque un problème d'incompétence. Tout est fait pour culpabiliser les profs.

 

J'ai lu quelque part que la mobilité dans la profession est de 1%, ce qui est aberrant ! Dans n'importe quelle profession aujourd'hui, on souhaite évoluer, surtout après dix ans. Aux USA tous mes collègues sans exception avaient eu une autre activité, et n'excluait pas d'y retourner. Je crois que notre rigidité toute française fait que tout le monde est perdant : les profs eux-mêmes bien sûr mais aussi  les élèves qui se retrouvent face à des personnes devenues amères.

 

Il n'y a que sur les forums anonymes que les choses se débloquent et que l'on voit l'ampleur du phénomène. Hier encore, je regardais un livre à ce sujet, écrit bien sûr sous un pseudonyme !"


Asma, Professeur des écoles, 38 ans et 15 ans d’ancienneté, ne supportait plus l'autorité hiérarchique telle qu'elle se pratique dans l'Education nationale: 

 

"Je suis devenue enseignante pour plusieurs raisons pratiques.

- Je souhaitais quitter la maison familiale avec un travail certain en poche. J'ai passé mes 4 ans d'études supérieures à travailler pendant les vacances pour meubler mon futur appartement. Un travail de fonctionnaire me donnait l'impression de savoir où j'allais. Une fois mon concours en poche, je serais certaine d'avoir un salaire.

 

- Comme j'aimais les enfants et que je n'avais pas d'autres idées, ma mère m'ayant découragé sur mes compétences à faire autre chose, je me suis orientée sur le métier de professeur des écoles.

 

Pourquoi je souhaite quitter ce métier :

- Au fond de moi, j'ai toujours su que je n'étais pas faite pour ça. Je ne pense pas être une mauvaise enseignante, mes élèves m'apprécient, ils apprennent, mais j'ai toujours eu l'impression d'être là par erreur, que je ne suis pas ici pour ça. 

 

- J'ai toujours été en décalage avec ce qu'on nous demande de faire, depuis l’ESPE, où tout était abstrait et idyllique par rapport au terrain.

 

- Je ne supporte pas la hiérarchie, les relations infantilisantes qu'on a avec elle. Mes collègues (et moi en partie) sont comme des enfants effrayées par l'inspectrice.

 

- Les conditions de travail se durcissent, notamment depuis les nouveaux rythmes scolaires. Je suis épuisée de devoir canaliser continuellement l'attention des élèves".


Aline, professeur d’anglais en lycée à plein temps, 49 ans et 24 ans d’ancienneté, étouffait dans ce système "qui lui faisait penser à l'armée"

 

"Je suis professeur agrégée depuis 24 ans, sans problème de discipline ni de pédagogie. Je n'ai pas réalisé de projets en équipe, car j'aime travailler seule. Depuis 24 ans que j'enseigne, je n'ai rencontré aucun souci particulier dans ma relation avec les élèves, les collègues, ou l'administration.

 

Je suis devenue enseignante sur les conseils de ma mère, enseignante elle aussi, qui m'a vanté la sécurité de l'emploi et les vacances.

 

Je m'aperçois aujourd'hui que je suis une personnalité trop indépendante pour continuer dans une institution trop étouffante et qui me fait penser à l'armée. Je rêve de pouvoir diriger ma vie et mon emploi du temps comme je le désire, quitte à gagner moins, pour retrouver ma liberté et surtout quitter un métier qui n'a plus de sens pour moi.

 

Enseigner me plaît mais n'a jamais été une vocation et en arrivant à 50 ans, je pense que c'est ma dernière chance de reconversion."


Clara, 27 ans, professeur de SVT, a décidé elle aussi de quitter son métier car déçue par son inspecteur pédagogique (IA-IPR) dont elle espérait de l'écoute et de vrais conseils. Elle les a obtenus auprès d'Aide aux Profs:

 

"Mes précédentes inspections se sont très bien passées, jusqu’à la dernière qui m’a fait rencontrer un nouveau « cas ». Je réintégrais après 1 année de dispo et j'ai alors été inspectée. Tant mieux, pensai-je, mes efforts seront enfin reconnus.

 

Aïe ! Cette épreuve m’a jetée plus bas que terre. Une petite remarque initiale de ce monsieur à propos de mon interruption, à laquelle j ‘ajoute mon commentaire : « oui, et c’est une expérience saine pour toute personne, surtout enseignante : on ne juge plus, on écoute et l’on fait ses preuves : excellent pour l’humilité ! » Après coup, je me suis dit qu’un petit tyranneau - comme il s’est révélé l’être – avait dû prendre bonne note de ma remarque.

 

Bref, un cahier de texte négligé par moi (je l’avoue franchement), une divergence d’opinion et de pratique sur la fameuse séquence (je le revendique) ont eu raison des heures de préparation (je compose bcp de documents moi-même) des heures de corrections, de réflexions, de la connaissance que j’avais de mes élèves (mes relations ont toujours été bonnes de ce côté-là, c’est pour moi un point central), et le lendemain, un rapport humiliant trône sur le bureau du principal.

 

Abattue, encore sonnée, je me traîne les semaines suivantes sans avoir jamais manqué un seul jour de travail mais ne fermant plus l’œil de la nuit. Les semaines ont passé, et j’ai écrit une lettre de 4 pages, très « correcte » mais ferme, réclamant mon droit de réponse. Copie au recteur.  Aucune nouvelle depuis. Dommage. Cela pour dire que non, je n’ai eu aucune confiance en un monsieur qui n’a pas voulu ou pu constater le travail que je fait avec sincérité et pour lequel je donne mon temps le soir sans compter. J’ai toujours accepté les critiques de mes inspecteurs, constructrices, on en a besoin, mais manifestement je faisais l’objet d’une revanche aussi ostentatoire que basse. Est-il besoin de préciser qu’à la lecture comparée de mes 2 précédents rapports d’inspection, il y a une opposition mot pour mot ? Me suis-je donc parjurée en quelques années ? A la fin de son monologue insultant (l’entretien) j’ai juste demandé « Et ce qui est positif ? » Fin de sa diatribe."


Clara, Professeur des écoles, 37 ans et 9 ans d’ancienneté, n'en pouvait plus, elle non plus, de la charge de travail de son métier :

 

"Je suis devenue enseignante parce que pouvoir participer à la formation des futurs citoyens m'importaient notamment en leur permettant de se construire un esprit critique, de développer des compétences pour vivre ensemble mais aussi par sécurité de l'emploi et salaire plus haut que celui d'animatrice. J'ai toujours aimé les métiers relationnels, orientés vers le social. Je vouais, à l'époque, une grande admiration pour cette institution en tant que fille d’émigrés ayant bénéficiée de cette école de la République.

 

Je ne sais pas encore si je souhaite définitivement quitter l'éducation nationale mais j'ai beaucoup de griefs contre cette institution qui n'a pas les moyens de ses affirmations ou qui ne veut pas réellement l'émancipation de tous ces futurs citoyens. Je souffre de ce paradoxe. Ensuite, la charge de travail demandée est très importante alors qu'il me semble que beaucoup de tâches (surtout de paperasserie) sont inutiles et empêchent de pouvoir approfondir nos connaissances et compétences professionnelles.

 

Nous ne sommes pas soutenus par notre hiérarchie sauf à être toujours d'accord avec elle. Cela me pèse aussi."


Mariannick, 39 ans, Professeur des Écoles en SEGPA depuis

(…) ans à plein temps, regrettait son poste à responsabilités dans la

publicité :

 

"J’ai travaillé 4 ans dans des agences de publicité à Paris en tant que chef de projet : coordination de projet, rédaction de rapports, gestion budgétaire et relationnel avec tous les intervenants me convenaient parfaitement. J’appréciais l’effervescence, la diversité des sujets abordés et la mobilisation intellectuelle. J’ai

été très vite propulsée à des postes à responsabilité grâce à la maîtrise de la langue anglaise.

 

Mais après ces 4 années, j’ai eu l’impression de brasser du vent, de ne pas être utile à une cause noble, de ne pas me préoccuper de sujets importants. Gagner de l’argent en vendant des campagnes de pub pour du yaourt me

semblaient soudain vil. Le rythme de 60 heures par semaine a aussi eu raison de moi. J’ai donc pris une année sabbatique pour voyager en solitaire puis j’ai passé le concours de PE. Guidée par des amis qui maîtrisaient les parcours dans l’EN, j’ai immédiatement postulé pour une formation CAPSAIS-F pour m’occuper des adolescents en difficulté en SEGPA. Cela fait donc X ans que je suis en collège avec des SEGPA. Par choix, j’ai voulu m’occuper des élèves qu’on ne pouvait pas prendre en charge, faute de temps et d’organisation, en classe entière de 25 et de surcroît d’adolescents

avec qui la relation scolaire me convenait mieux que celle des enfants du primaire.

 

J’ai beaucoup de satisfaction dans la relation d’aide, qu’elle soit sociale, psychologique, familiale ou bien entendu scolaire. Mais je suis arrivée au bout de mon envie de sauver le monde, et leurs déficiences (plus souvent de l’ordre de l’éducation par leur famille négligentes que des réelles incapacités d’apprentissage) m’usent.

 

Irrespect, violences verbales, manque de projet de vie me laminent surtout quand l’institution trouve normal tout le travail fait en temps ordinaire et ne relève que les imperfections. Oui, comme beaucoup, je manque de reconnaissance de mon travail, d’encouragements et de perspectives d’évolution."


 

CES TEMOIGNAGES SONT UN ECHANTILLON, NON EXHAUSTIF

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